lundi 26 septembre 2016

Décès de Joseph Sitruk, charismatique leader du judaïsme français Par Agnès Leclair Publié le 25/09/2016 à 20:03

DISPARITION - L'ancien grand rabbin français est mort le 25 septembre à l'âge de 71 ans. Né à Tunis, ce partisan d'une laïcité «tolérante» s'est imposé en trois septennats comme un chef spirituel ultramédiatique.
Une grande voix du judaïsme français s'est éteinte. L'ancien grand rabbin Joseph Sitruk est mort le 25 septembre à l'âge de 71 ans. Sa rigueur tout en rondeur, sa séduction et son charisme mis au service de l'orthodoxie religieuse ont laissé une empreinte profonde sur la communauté juive de France qu'il a guidée pendant 21 ans, de 1987 à 2008.
Dimanche, François Hollande a salué la mémoire d'un «homme de dialogue, défenseur de la laïcité, (...) une figure marquante du judaïsme français». L'actuel grand rabbin de France, Haïm Korsia, qui fut son collaborateur, a exprimé sa «tristesse et douleur immense».
Barbe blanche fournie, kippa noire sur la tête, Joseph Sitruk, séfarade né à Tunis, s'est imposé en trois septennats comme un chef spirituel ultramédiatique. Partisan d'une laïcité «tolérante», il s'est notamment élevé contre la loi de 2003 sur le voile, interdisant les signes religieux ostentatoires à l'école. Deux ans plus tôt, en 2001, le «rav» avait plaidé auprès du premier ministre de l'époque, Lionel Jospin, pour éviter l'organisation d'examens scolaires les jours de fêtes juives. Il défendait également l'introduction de «l'instruction religieuse» au lycée. En 1994, «Jo» Sitruk avait aussi appelé les juifs pratiquants à ne pas participer au second tour des élections cantonales car elles coïncidaient avec le premier soir de Pessah, la pâque juive. Il a également marqué l'actualité, dans sa lutte contre l'antisémitisme ou comme grand témoin aux procès de Paul Touvier et de Maurice Papon.

«Survivant de la prière»

Homme de terrain, animé par la volonté de «judaïser les juifs», le grand rabbin Sitruk a œuvré pour la multiplication des écoles juives et des synagogues. Désireux de rassembler une communauté parfois divisée, notamment au sujet de la politique israélienne, il a créé les journées du judaïsme français «Yom Hatorah», réunissant plusieurs milliers de personnes au Bourget.
Quand il évoquait son parcours, ce père de neuf enfants, lui-même issu d'une famille non pratiquante, racontait avoir eu «le coup de foudre pour le judaïsme en pleine adolescence»et se disait «amoureux de sa foi comme on peut l'être d'une femme». Après un grave accident vasculaire cérébral en 2001, il s'est décrit en «survivant de la prière» dans son livre Rien ne vaut la vie.
Enfin, celui qui fut aussi grand rabbin de Marseille s'est illustré comme défenseur de la stricte observance de la loi juive, la «halakha» et par son conservatisme sur les sujets de la place des femmes dans la vie communautaire, des mariages mixtes ou des conversions ou encore du Pacs, en 1998. Des prises de positions controversées au sein de la communauté juive. Dernière en date, une chronique sur Radio J au sujet du défilé de la Gay Pride de Tel Aviv qu'il avait considérée comme une «tentative d'extermination morale du peuple d'Israël». Au-delà des controverses, reste l'image d'un homme passionné, entier.L'écrivain Edmonde Charles-Roux aurait dit à son sujet: «Pour lui, on ne peut pas être à moitié juif».

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